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Le droit passerelle : tout bénéfice pour le secteur Horeca ?
26 novembre 2020

Au nom de ses membres exploitants Horeca, le SDI conteste formellement les résultats de la Brève n°50 de l’Institut pour un Développement Durable (IDD), selon laquelle 45% des cafetiers, restaurateurs et traiteurs bénéficieraient, avec le droit passerelle, d’un revenu supérieur à ce qu’ils percevaient avant la crise. En effet, cette note ne prend pas en compte les spécificités du secteur ni le contexte exceptionnel de la crise du Covid-19 !

Pour la grande majorité des exploitants qui traversent une situation dramatique et qui sont visés par la note de l’IDD, il est extrêmement pénible, voire insultant de constater que celle-ci donne une image caricaturale de leur secteur et qu’elle pourrait même servir de base à d’éventuelles réductions d’aides.

Pour le SDI, le caractère réducteur et polémique de la note est inacceptable. Ses auteurs semblent en effet avoir oublié que :

-Comme tous les indépendants, les exploitants du secteur constituent une catégorie professionnelle multiforme qu’il est très difficile d’appréhender, tant les métiers que ce statut recouvre sont variés.

-Il est de notoriété publique que les revenus des indépendants sont très fluctuants d’une année à l’autre, voire même d’un trimestre à l’autre. Il s’agit même d’une des difficultés principales de ce statut : l’absence d’étalement des revenus dans le temps. La réforme du calcul des cotisations d’indépendant, calculées depuis 2015 sur l’année même, en est l’exemple le plus criant. Dès lors, il est de l’avis du SDI qu’interpréter correctement les quelques données chiffrées disponibles sur les revenus des indépendants est un exercice périlleux qui doit s’entourer de toute la circonspection nécessaire.

-Se baser sur des revenus de 2016, extrapoler les chiffres sur base de critères discutables, en tirer des conclusions simplistes, puis diffuser la note dans les médias est un comportement aussi léger qu’irrespectueux vis-à-vis d’un secteur qui a été obligé de fermer sans aucune preuve scientifique qu’il constituait bien un foyer de contamination et auquel la collectivité a donc un devoir moral de porter assistance.

-En 2020, les finances des exploitants ont été fragilisées par les importants investissements consentis pour mettre en place des mesures de protection (aménagement des locaux, désinfectant, plexiglass, masques, etc.). Cela rend la comparaison faite par l’IDD entre la situation de 2016 et la situation 2020 d’autant moins pertinente !

-Pendant les périodes où ils ont été autorisés à rouvrir, les revenus de l’immense majorité des exploitants ont été fortement impactés en raison de l’obligation de distanciation sociale qui a réduit la capacité d’accueil des établissements. Les pertes de chiffres d’affaires engendrées rendent également caduque la comparaison faite par l’IDD entre la situation de 2016 et la situation 2020 !

-Les dommages engendrés au secteur sont largement plus importants que le manque à gagner engendré par l’obligation de fermeture. En effet, cette mesure a eu pour effet d’ostraciser les exploitants en les désignant injustement mais immanquablement comme responsables de la crise en cours. Après le déconfinement, le secteur mettra certainement des mois, voire des années, à se relever de cette image négative.

-L’étude de l’IDD ne prend pas non plus en compte les pertes de boissons et nourritures engendrées par le caractère soudain des deux obligations de fermeture intervenues. En effet, le secteur est passé, du jour au lendemain, de la possibilité d’ouvrir sans restriction à la fermeture pure et simple, sans possibilité d’anticiper et de limiter ses pertes. Cette imprévisibilité a été renforcée par le discours contradictoire, cacophonique et décousu du gouvernement et des experts tout au long de la crise. Rien que les pertes en nourriture ont souvent largement dépassé l’équivalent de plusieurs mois de droit passerelle !

-La situation des indépendants du secteur ne peut en aucun cas être comparée à celle des salariés, comme le fait pourtant la note de l’IDD. Outre le fait que ces exploitants doivent subvenir aux besoins de leur ménage, ils sont en effet tenus d’assumer également une série de frais fixes liés à leur activité professionnelle et qui peuvent être très importants : loyers, fournitures, charges, frais de personnel, remboursements de prêts, acomptes TVA…

-Le secteur Horeca apporte une valeur ajoutée à notre économie qui n’est pas non plus comparable à celle qu’engendrent les salariés. Il est non seulement pourvoyeur d’emplois, mais il contribue également fortement au bien-être des citoyens et à l’attractivité touristique de notre pays.

-L’analyse de l’IDD semble biaisée par ce qui semble constituer l’objectif final, de nature politique, de la note : plaider pour une refonte globale du statut social des indépendants.

Pour ces raisons, le SDI estime que le droit passerelle a été – et est toujours – totalement insuffisant pour compenser l’intégralité du préjudice subi par les exploitants Horeca qui étaient déjà fortement fragilisés à la base, indépendamment de la crise du Covid-19.

En effet, le SDI rappelle que la précarité du secteur Horeca est une réalité.

Rien qu’en 2019, notre pays a connu quelque 10.900 faillites d’entreprises. Comme chaque année, un des secteurs les plus pénalisés a été l’Horeca, avec 1.885 faillites. Il s’agit d’une hausse significative par rapport à l’année précédente : +54% pour les restaurateurs, +11% pour les snacks et + 6,50% pour les cafés.

Alors que le taux de défaillance général des indépendants et entreprises était en 2019 de 0,85%, il a été de 3,38% pour l’Horeca, soit 4 fois la moyenne nationale !

Le SDI rappelle aussi qu’en décembre 2018, le ministre fédéral des PME et des Indépendants a officiellement reconnu, via une circulaire, le secteur comme étant en crise.

Les explications aux difficultés traversées par l’Horeca sont à analyser autour de plusieurs axes.

-Tout d’abord, il est victime depuis quelques années d’une forte inflation des charges. Qu’elles soient réglementaires, fiscales ou sociales, ces contraintes pèsent lourdement sur la survie des établissements Horeca.

-Les campagnes de lutte et de sensibilisation contre le tabagisme ont également eu un impact négatif pour le secteur et ont engendré une diminution de la fréquentation des clients.

-L’arrivée de la caisse enregistreuse certifiée (“boite noire”) a contribué à fragiliser un grand nombre d’établissements.

-On assiste à une augmentation incessante des exigences en termes de sécurité et d’hygiène. Les normes, le coût des contrôles à charge de l’exploitant et les primes d’assurances sont devenus exorbitants. A titre d’exemples : accessibilité, déchets, évacuation des eaux usées, jours d’ouverture et de fermeture, toilettes, réglementation communale, engagement de personnel, commission paritaire de l’Industrie hôtelière, sécurité alimentaire, permis d’environnement, normes acoustiques, rémunération équitable,…

-La hausse du prix des matières premières affecte le secteur qui doit fonctionner avec des marges très réduites.

-Le faible niveau d’attractivité en termes d’emplois nuit au bon fonctionnement du secteur.

-Le secteur doit jongler avec trois taux de TVA différents, ce qui nuit à l’efficacité opérationnelle de nombreux établissements.

-Les consommateurs sont de plus en plus exigeants et de moins en moins fidèles, contribuant à une désaffection de nombreux établissements.

-Le secteur Horeca est caractérisé par une pénibilité accrue de la charge de travail, certains aspects du métier ayant un impact négatif sur la sécurité et la santé au travail :

  • les charges de travail élevées ;
  • les stations debout prolongées et les positions statiques ;
  • le contact avec des clients (parfois difficiles) ;
  • la proportion élevée de travail en soirée et le week-end, qui perturbe l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée ;
  • le stress élevé ;
  • le travail répétitif ;
  • les contrôles sociaux et fiscaux à répétition ;
  • la mauvaise image véhiculée dans l’esprit du public …

-L’éclatement de la consommation hors repas, le retour au chez soi et la prolifération des cantines de travail finissent par faire déserter de nombreux établissements habitués auparavant à ce genre de consommation.

-L’augmentation du nombre de circuits alternatifs (boulangeries, épiceries, snacks, pittas, food trucks, etc.) avec proposition d’une offre financière très attractive disperse considérablement l’offre Horeca disponible.

 -Le développement et le boom du “bio”, l’encouragement de la production locale réorientent une partie de la consommation vers d’autres filières.

-Enfin, le développement d’une vraie offre des industriels sur des produits prêts à consommer avec des prix très compétitifs pour le consommateur nuisent au secteur Horeca.

 

 

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